Randonnée littéraire sur une terre d'utopie

Fabienne Pasquet est l'auteure en résidence de «Par dessus le mur, l'écriture», trois jours de randonnée littéraire du 10 au 12 octobre 2003 dans le Jura.

 

«Passage et perméabilité»: le thème de la deuxième édition de «Par-dessus le mur, l'écriture», manifestation franco-suisse au fil du Jura, va comme un gant à Fabienne Pasquet. Comédienne, traductrice et romancière, l'auteure en résidence de «Par-dessus le mur, l'écriture» est de mère franco-suisse d'origine russe et de père haïtien. Elle a vécu à New York, à Bologne et à Moscou, avant de s'installer dans les Alpes de Haute-Provence. C'est dire si elle est sensible à la perméabilité des frontières, aux passages entre cultures, langues et textes, et aux espaces tant imaginaires que géographiques. L'auteure de L'Ombre de Baudelaire et de La Deuxième mort de Toussaint Louverture (prix Schiller en 2002 et prix Marcel Aymé cette année), évoque la magie du Jura, où elle a vécu en résidence de janvier à mars 2003 et qui lui a inspiré un long récit (à paraître chez Actes Sud). Il sera dit par des comédiens samedi soir, dans le cadre de trois jours de pérégrinations littéraires, de vendredi à dimanche entre Mont d'Or et Le Chasseron. Entretien.

 

Comment s'est déroulée votre «résidence»?

Fabienne Pasquet: C'était une résidence itinérante! J'ai beaucoup bougé dans toute la région entre le Mont d'Or et Le Chasseron, de Pontarlier à Yverdon et Neuchâtel, jusqu'au Val-de-Travers. Je voulais me plonger dans cette nature. Je dormais chaque jour dans un autre village. J'ai choisi d'aborder le thème «Passage et perméabilité» sous l'angle des matières premières,qui n'ont pas de frontières: l'eau, le bois, le fer et la pierre. J'ai rencontré des forgerons, des bûcherons, des gens travaillant dans les carrières, des métiers disparus. J'ai commencé à écrire plus tard, en rentrant de ces trois mois.

Qu'avez-vous découvert dans le Jura?

– Il est plein d'endroits perdus, oubliés. Il y a ces pierres erratiques dressées, formées par les glaciers. Elles sont vénérées par les hommes, depuis les celtes et jusqu'à aujourd'hui: il existe encore des cérémonies autour de ces blocs de granit. C'est fou. J'ai aussi rencontré des gens qui ont décidé de remettre à jour les mines d'extraction de fer de la région Longeville-Mont d'Or. Ils les recherchent avec des baguettes de sourcier... Il faut savoir que le Jura est truffé de mines. On marche sur un réseau de galeries qui s'effondrent parfois! Je suis allée dans une carrière d'où l'on tirait d'un bloc les bassins de pierre des lavoirs. La forêt a repris le dessus, mais il y a une clairière où l'on voit ces rochers creusés aux formes bizarres...

Qu'est-ce que cela vous a inspiré?

– Des récits entrecroisés qui suivent une lignée de femmes – quatre générations de forgeronnes – sur un siècle entier, de la Russie au Jura. Le Jura est une terre d'utopie qui a accueilli Fournier, Proudhon, les anarchistes. J'ai écrit une utopie féminine déclinée à travers le mythe des amazones, en jouant avec le thème du fer. Samedi soir, des acteurs qui participent au week-end diront un découpage de mon texte, qui est encore en travail.

 

Rens. et inscriptions pour le week-end du 10 au 12 octobre 2003: Arthis (France), 0033 384 45 18 47 ou Maisons Mainou (Genève), 022 750 02 50.

http://www.lecourrier.ch/randonnee_litteraire_sur_une_terre_d_utopie