Derrière la façade 

On a envie de comparer la structure de son deuxième roman – après Marine et Lila – à celle d’une maison, solide et chaleureuse: bâtie avec soin et dans le respect des proportions, entre vastes pièces et coins secrets, elle ouvre sur l’horizon d’un jardin tout en ménageant des escaliers plus sombres qui explorent d’autres dimensions de l’espace et du temps. Une vieille demeure est bien le personnage principal d’Une Maison jaune, récit d’Abigaïl Seran entrelaçant les points de vue de trois femmes qui y ont résidé à des décennies ­d’écart, du début du XXe siècle à nos jours.


La première, à l’époque où la bâtisse trônait au centre d’un vaste parc, est une jeune fille soudain prise dans les rets d’un mariage arrangé; la seconde, une jeune Italienne venue rejoindre ses parents logeant dans les combles, qui lie une relation intense avec la riche propriétaire, une talentueuse pianiste; la dernière, adolescente, y vit avec sa mère tout juste séparée en attendant que la maison soit détruite, et enquête sur le passé des lieux après avoir découvert de vieilles lettres. Peu à peu s’éclaireront les trajectoires de ces femmes prises dans les tourments de leur époque, et les liens entre elles par-delà le temps. Réussi, le dispositif suscite une réelle attente et Abigaïl Seran déroule ses fils avec finesse. L’auteure romande publie en parallèle ses pétillantes Chroniques d’une maman ordinaire, illustrées par Jenay Loetscher (Ed. Favre).

 
 

ABIGAÏL SERAN, UNE MAISON JAUNE, ED. PLAISIR DE LIRE, 2015, 302 PP.

 

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