Suivez le chat

«Comme j’ai déjà tenté de l’expliquer deux fois, le roi d’Olten est un chat noir et blanc appelé Toulouse, qui, grâce à ses dons exceptionnels, règne sur la Vieille-Ville», écrit Alex Capus dans «Le roi d’Olten (3)», troisième texte du recueil du même nom. Il essayera de cerner son insaisissable félin au fil de six de la vingtaine des courtes proses qui composent Le Roi d’Olten, avant de laisser la place à d’autres thèmes: le hooliganisme des dames âgées et celui des jeunes écrivains, Olten et sa piscine publique, son brouillard et ses villas tranquilles, les voisins curieux, l’importance des cheminots... De fait, c’est Olten, ville d’origine de l’écrivain franco-suisse, qui constitue le personnage principal de ces récits parus entre 2002 et 2009 dans divers journaux et revues. Mais «depuis lors beaucoup d’eau a coulé sous les ponts de l’Aar; nous avons tous changé, et Olten est devenue une ville radicalement différente», prévient Capus en guise d’avant-propos. Le ton est donné: humour en demi-teinte et autodérision s’allient à une simplicité sensible et doucement ironique pour donner forme à de savoureuses proses où l’auteur s’amuse à jouer avec la réalité. Sous le charme de ce regard faussement naïf, on le suit sans se faire prier.

Au fil de ces balades à Olten et dans son histoire se dessine le portrait de l’auteur, notamment dans son rapport à l’écriture. Dans «Devoir filial», il relate l’attente après qu’il a envoyé son nouveau livre à sa mère, ces quelques jours avant qu’elle ne l’appelle, très inquiète pour lui et son avenir. Les «Battements de cils du bonheur», ce sont ces brefs instants de félicité que procure l’écriture entre deux «éternités d’incertitude et de doute de soi». Mais Capus met en garde: «Le problème, c’est que les gens veulent toujours croire tout ce qu’ils lisent», note-t-il dans le cocasse «Fiction et réalité». Et de raconter comment voisins et amis se reconnaissent dans ses romans et refusent de croire qu’il n’a jamais trouvé de berger allemand ou que son cadet n’est pas tombé dans l’escalier. Avant de conclure par une délicieuse pirouette... 

Alex Capus, Le roi d'Olten, tr. par Anne Cuneo, Ed. Campiche, 2011.

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