Sépulture vivante

Rose Envy? C’est le nom du gloss «fondant et satiné» que Smoothie s’applique sur les lèvres avant de boire un breuvage particulier, lors d’un rituel longuement préparé: un verre de vin avec une cuillerée des cendres de son défunt mari. Rose Envy, c’est aussi le titre du dernier très bref roman de Dominique de Rivaz, qui figure parmi les douze finalistes du Prix Wepler, en France. Auteure et cinéaste vivant entre Berne et Berlin, Dominique de Rivaz dédie son opus «aux femmes de toutes les époques, passées, présentes et à venir, médiatisées ou à jamais silencieuses, qui ont choisi, choisissent et choisiront d’être une breath living tomb, le tombeau vivant d’un être qu’elles ont passionnément aimé».

C’est donc ce que fera Smoothie, incarnée ici par un «tu» qui interpelle le lecteur. La jeune femme – qui a pour habitude de se ronger l’intérieur de la bouche – est fascinée par l’histoire d’Artemisia: au IVe siècle avant J.-C., la reine grecque but par amour les cendres de son défunt mari. Frappée par le deuil, Smoothie franchira les frontières inquiétantes de la consommation de l’Autre...

Les événements qui s’enchaînent ont tous trait au thème du cannibalisme, pris sous différentes facettes: de la fusion amoureuse à l’automutilation en passant par La robe de viande, œuvre de l’artiste Jana Sterbak vue lors de l’expo «Tous cannibales», sans oublier moult références littéraires, ni les surnoms liés à la nourriture que Pierrot donne à sa famille (Smoothie, donc, et Crotchon pour l’enfant). Peu de chair, sur cette ossature conceptuelle: elle est réduite à l’essentiel et le livre tombe parfois dans le piège de la démonstration. Un peu mince.

 

DOMINIQUE DE RIVAZ, ROSE ENVY, ED. ZOE, 2012, 73 PP.

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