Amours interdites au temps de Mary Stuart

Dépaysement assuré avec le premier roman de Rachel Zufferey, jeune Valaisanne passionnée par la Renaissance et l’Ecosse, où elle a vécu plusieurs mois: La Pupille de Sutherland s’inspire des mythes et légendes des plaines sauvages des Highlands pour nous embarquer dans l’Ecosse du XVIe siècle, sur les traces d’une jeune femme qui s’opposera aux carcans de son rang et de son sexe. Un véritable roman d’amour et d’aventure, qui enchaîne intrigues et péripéties sans temps mort sur près de 700 pages!

La pupille, c’est Kirsty Dunbar. A 17 ans, elle mène une existence protégée dans le château de son oncle, sur les terres de Sutherland. Le roman s’ouvre par sa rencontre à cheval avec Hamish Ross, Highlander en mission pour son clan. Leur attirance est immédiate mais sera lourde de conséquences: tout sépare en effet la jeune noble du monde rude des Highlanders, fiers habitants des Hautes Terres écossaises. Mais Kirsty est têtue. Pour la punir et l’éloigner, son oncle l’envoie à la cour de Mary Stuart où la jeune femme, devenue dame de compagnie de la reine, découvrira la violence des jeux de pouvoir et celle faite aux femmes. Car haute société rime ici avec aliénation: elles ne sont que monnaie d’échange qui sert au jeu des alliances politiques, objets de convoitise attendant d’être épousées, trop souvent trompées sans vergogne, si ce n’est violées pour les remettre à leur place.

Entre amitiés et complots, désirs et trahisons, rébellion et humiliations, Rachel Zufferey montre son héroïne en quête de liberté se heurtant à une société rigide qui aura presque raison d’elle, tandis qu’en arrière-plan l’Ecosse se déchire, minée par des luttes de clans qui finiront par l’emprisonnement de Mary Stuart. De son côté, afin d’oublier la pupille, Hamish se perd dans une errance qui le mènera jusqu’en France. L’auteure alterne avec naturel première et troisième personne du singulier, passant du point de vue de son héroïne à une fresque plus vaste de cette période tourmentée à travers une multitude de personnages. Et comme dans tout conte de fée, après moult rebondissements, l’amour sera le plus fort – et Kirsty la rebelle découvrira chez les Highlanders un monde où les femmes ont voix au chapitre...

Dommage que l’histoire d’amour évoque trop souvent celles des romans à l’eau de rose. Mais son arrière-plan historique et politique donne tout son sel à La Pupille de Sutherland, ainsi que l’imagination débordante de l’auteure, dont le plaisir à se plonger dans cette époque violente et enchantée se révèle contagieux.

 

RACHEL ZUFFEREY, LA PUPILLE DE SUTHERLAND, ED. PLAISIR DE LIRE, 2013, 640 PP.

http://www.lecourrier.ch/118557/amours_interdites_au_temps_de_mary_stuart