Sous le vaste ciel

Le récit est découpé en brefs fragments qui laissent respirer la blancheur de la page, où chaque mot pèse de son juste poids dans le silence alentour. Celui de la montagne et de la neige, de la chaleur de l’été, celui de cet enfant élevé avec son frère par ses grands-parents et du barrage imposant qui le fascine, celui des mayens hauts perchés et du village englouti par les flots. La Genevoise Sybille Monney associe langue limpide et clarté des images dans un premier livre au titre vibrant de tout un monde, Paravalanches.

Cet univers montagnard, où la nature est marquée par les signes de présence humaine, défile au gré de petites scènes éclairées par la figure d’un grand-père aimé. Les ruches, le bisse, les champs, le feu dans la montagne, une promenade avec le père, les courses à l’épicerie, les gestes quotidiens... Entre ces fragments poétiques ancrés dans la concrétude des jours s’intercalent des passages en italiques à la première personne où le garçon voit parfois surgir l’image de sa mère – sur un drap suspendu, dans un camion chargé de libellules, dans le cockpit d’un planeur. Un jour, le grand-père fait une chute fatale.

Sybille Monney évoque l’apprentissage de la perte et de la solitude avec une douceur et une économie de moyens qui exacerbent l’émotion. Il faut «faire avec l’absence. Faire de l’absence une présence.» C’est aussi ce qu’accomplit son écriture elliptique, à la manière d’un paravalanche qui retiendrait les larmes mais dont le délicat filet capterait les sentiments les plus subtils et les aléas bigarrés du réel. 

SYBILLE MONNEY, PARAVALANCHES, ED. SAMIZDAT, 2014, 67 PP.

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