Un garçon différent

Bad est un enfant à part. Il a parlé très tard, son physique est un peu tordu, mais surtout il compte tout: les abeilles, les cheveux, les pissenlits du pré ou les cornettes du repas, ses respirations comme les épis du champ voisin. «Bad est une planète à lui tout seul, avec ses règles, ses références, ses lois arithmétiques», glisse la mère du surdoué, narratrice de Bad (Ed. Morrattel), le cinquième roman de Daniel Fazan, chroniqueur et ex-homme de radio. Pas facile d’être la mère d’un garçon pour qui n’existe que la logique et qui ne comprend pas le sens de l’empathie. Lassée d’attendre un signe de son rejeton qui fait une carrière fulgurante aux quatre coins du monde, elle décidera de prendre sa revanche contre l’amertume: elle aussi deviendra mondialement célèbre, en tant que miss quatrième âge...
La verve révoltée de Reine Lélène donne son rythme à Bad. Pétillant, irrévérencieux et libre, le texte démarre sur les chapeaux de roue à la suite de cette mamie fantasque et décomplexée qui défie les années et revient sur une trajectoire hors normes. Si on salue l’originalité de cette voix, son humour et son appétit de vivre, le roman finit pourtant par s’essouffler. Serait-ce faute de respirations? Pour que l’avalanche de péripéties racontées par Reine Lélène garde toute sa saveur et son intensité, il aurait sans doute gagné à être plus resserré, et son rythme plus diversifié.

 Daniel Fazan. Bad, Ed. Olivier Morrattel, 2015.